🔊 Le Figaro : réaction du Syndicat à l'application Reporty à Nice(06)

Publié le 15 Janvier 2018

Nice : une application pour transmettre des vidéos en direct à la police

🔊 Le Figaro : réaction du Syndicat à l'application Reporty à Nice(06)

La ville va expérimenter une application de smartphone permettant à ses utilisateurs d'envoyer en direct à la police les images d'infractions ou accidents qu'ils pourraient constater. Un gain d'efficacité selon ses promoteurs, une initiative qui pourrait à la fois poser un problème moral et de sécurité selon ses détracteurs.

Faire de chacun «un citoyen engagé acteur de sa propre sécurité». C'est l'ambition affichée par la mairie de Nice qui lance aujourd'hui le test d'une application baptisée Reporty, développée par la société de l'ancien premier ministre israélien Ehud Barak. Le principe: permettre à tout possesseur de smartphone de transmettre en direct aux autorités les images d'une éventuelle incivilité, agression ou accident. Pour le moment, un panel de 2000 personnes a été sélectionné pour l'utiliser, composé pour moitié d'agents municipaux, pour l'autre de volontaires issus de comités de quartier, des voisins vigilants ou encore de la réserve civile et citoyenne. L'avantage de cette application: l'appel, géolocalisé, permet aux services situer avec une grande précision le lieu d'où il a été émis.

Deux agents sont entièrement dédiés à la réception des images envoyées par les utilisateurs de l'application. Ils disposent pour cela d'un écran où peuvent s'afficher 8 appels simultanés. La connaissance des utilisateurs de l'application doit ajouter à la qualité de l'information reçues par les services de sécurité. Il est d'ailleurs possible d'exclure du service les personnes qui en abuseraient ou ne l'utilisant pas correctement.

 

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Les situations dans lesquelles l'application peut être utilisées sont variées. Elles peuvent aller de l'incivisme, tels que les tags, les dépôts sauvages, les nuisances sonores ou des voitures mal garées, jusqu'à de véritables situations d'urgence comme des vols, des agressions, des incendies ou des inondations. En exemple, la mairie propose le cas d'un cycliste renversé. Grâce à l'appel, les secours pourront savoir précisément où a eu lieu l'incident et les services de police pourront travailler rapidement à retrouver le conducteur coupable grâce à la vidéo surveillance et la mobilisation des caméras sur la zone.

Réticences

Les images ne sont pas enregistrées dans le téléphone des utilisateurs. Elles sont en revanche conservées pendant 10 jours dans les serveurs du Centre de supervision urbain de la police municipale, comme pour celles issues des caméras de surveillance classiques. La CNIL a validé cette expérimentation.

Malgré cette précaution, l'initiative n'est pas du goût de tous. Ainsi, Patrick Allemand, conseiller municipal d'opposition (PS), explique s'être «ému de cette démarche contestable sur le fond et inadmissible sur la forme». «Il y a un danger d'atteinte à la vie privée», affirme-t-il, dénonçant «l'organisation d'un processus de délation généralisée: où cela va-t-il s'arrêter?». «Sans compter qu'il risque d'y avoir un danger pour les utilisateurs eux-mêmes, qui peuvent se retrouver dans des situations compliquées.»

«Il n'est jamais bon de déléguer un service public de sécurité à des citoyens»

Cédric Michel, président du Syndicat de défense des policier municipaux

 

Même tonalité du côté du Syndicat de défense des policier municipaux, dont le président, Cédric Michel, se montre plus que réservé face à cette initiative de la ville de Nice, qui compte par ailleurs le plus gros effectif de policiers municipaux de l'Hexagone. «Nous pensons qu'il n'est jamais bon de déléguer un service public de sécurité à des citoyens. Sur tous les utilisateurs de l'application, quelle va être la part de ceux qui vont découvrir des incivilités de manière inopinée et la part de ceux qui, au contraire, vont se sentir investis d'une mission, traquer le délit ou l'incident et donc s'exposer de façon dangereuse? Nous estimons que la constatation des infractions doit uniquement relever de la police et que la sécurité doit rester entre les mains de professionnels.»

L'expérimentation de l'application Reporty, qui n'est pour le moment pas facturée à la ville, doit durer jusqu'au 10 mars prochain. Deux bilans seront effectués, un premier dans un mois, le second un mois plus tard. En cas de retours positifs, une extension du dispositif pourrait être envisagée.

Le Figaro publié le 15/01/2018 à 15:17

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