Comment la droite rogne le statut des fonctionnaires
Publié le 15 Novembre 2011
Par Emilie Lévêque - publié le 14/11/2011 à 16:57
Délai de carence en cas d'arrêt maladie, durée et taux de cotisation pour la retraite, primes de performance... Par petites touches, le gouvernement rapproche le statut des fonctionnaires de celui des salariés du privé.
Manifestation de fonctionnaires à Paris en janvier 2009.
En dévoilant la semaine dernière un deuxième plan de rigueur, le Premier ministre François Fillon a annoncé que les dépenses de l'Etat seraient réduites de 500 millions d'euros supplémentaires en2012. Pour y parvenir, le gouvernement envisage notamment d'instaurer une journée de carence pour les fonctionnaires en cas d'arrêt maladie. Autrement dit, une période pendant laquelle l'indemnité journalière n'est pas versée par l'assurance maladie. Le délai de carence s'impose déjà aux salariés du privé où il pourrait être porté de trois à quatre jours dans le cadre de la même réforme. Si certains, comme à la CGPME, dénoncent comme "illégitime et injuste que les fonctionnaires voient maintenu leur traitement dès le 2e jour d'arrêt tandis que les salariés du privé ne bénéficieraient d'indemnités journalières qu'au bout de 5 jours d'arrêt", les syndicats de la fonction publique, eux, y voient une nouvelle atteinte à leur statut.
De fait, depuis que la droite est au pouvoir, ce "sacro-saint statut privilégié" a subi de nombreux coups de canif. C'est notamment le cas en matière de retraite. Depuis la réforme Fillon de 2003, les règles d'âge et de durée de cotisation du secteur privé s'appliquent aussi aux fonctionnaires. La réforme des retraites de 2010, qui repousse de deux ans l'âge légal de départ (de 60 à 62 ans) et l'âge de la retraite à taux plein (de 65 à 67 ans), s'applique donc aussi aux fonctionnaires.
En outre, les agents de la Fonction publique vont progressivement payer autant que les salariés du privé pour leur retraite. Leur taux de cotisation va passer de 7,85% actuellement à 10,55% d'ici à 2018, le même taux que dans le privé. Le calcul de la pension de retraite reste cependant différent: 75% des six derniers mois de traitement pour les fonctionnaires, 50% de la moyenne des 25 meilleures années de la carrière dans le privé.
Bientôt une prime d'intéressement à la performanceLa mise en oeuvre d'un politique de primes individuelles et collectives pour les fonctionnaires est un autre exemple d'alignement sur le privé. En 2008, le gouvernement a mis en place la rémunération au mérite individuelle, dite prime de fonctions et de résultats. Cette prime concerne actuellement 60 000 agents. Et à compter de 2013, les quelque 2,4 millions d'agents de la Fonction publique d'Etat percevront une prime d'intéressement collectif si le service dans lequel ils travaillent est jugé performant. Les primes constituent ainsi une part grandissante de la rémunération des fonctionnaires alors que la partie indicielle est gelée pour deux ans, au grand dam des syndicats qui la considèrent comme la seule mesure équitable, car touchant tous les agents.
Finalement, il n'y a qu'un pilier du statut des fonctionnaires auquel le gouvernement ne s'est pas attaqué: l'emploi à vie. Encore que... Si l'appel de Christian Jacob, le président de groupe UMP à l'Assemblée, à remettre en cause l'emploi à vie des fonctionnaires est resté lettre morte, il est déjà possible, en réalité, de licencier les fonctionnaires. Un décret paru en 2010 prévoit le licenciement d'un fonctionnaire s'il refuse trois offres d'emploi suite à une réorganisation de son administration. Un peu comme les chômeurs qui peuvent être radiés des listes de Pôle emploi s'ils refusent trois offres "raisonnables" d'emploi.