La lutte contre l'insécurité routière a marqué le pas en 2010
Publié le 30 Décembre 2010
La Prévention routière et Assureurs prévention présentent jeudi 30 décembre leur campagne de sensibilisation sur les dangers de l’alcool au volant, sur le thème : « Pour les fêtes, le plus beau des cadeaux, c’est de rentrer en vie. » Outre les affiches, un site Internet va donner tous les conseils utiles pour éviter de prendre le volant sous l’emprise de l’alcool et lutter contre certaines idées reçues (comme : « j’ai l’habitude de boire, je peux conduire »). Des conseils qui ne sont pas superflus, à l’heure d’un bilan 2010 mitigé en matière de sécurité routière.
Campagne de la Prévention routière.
Quel est le bilan attendu pour 2010 ?
Sur le plan des statistiques, rien de désastreux. L’année 2010 devrait même enregistrer une baisse du
nombre de tués sur les routes de France par rapport à 2009. Une inflexion qui devra cependant beaucoup à la météo… et qui reste insuffisante au regard des objectifs fixés en 2002 par Nicolas
Sarkozy de faire passer le nombre de tués sous la barre des 3000 en 2012.
« Pour y parvenir, il faudrait enregistrer des baisses de plus de 13 % en 2010 et en 2011. Or, avec une fourchette qui sera sans doute comprise entre 4050 et 4100 morts, nous serons loin du
compte », estime Bernard Pottier, président de l’association Prévention routière. L’an dernier, seul
l’épisode neigeux du mois de décembre avait permis de finir l’année sur un chiffre stable par rapport à 2008.
« Les gens se sont moins déplacés, ce qui avait fait baisser le nombre de morts pour un mois de décembre à un niveau historiquement bas », explique Bernard Pottier. Au total, l’année 2009 – qui
avait pourtant fort mal commencé – s’était achevée avec 4273 tués, contre 4275 en 2008.
Il y a fort à parier que les mêmes causes produiront cette année les mêmes effets, la neige de ces dernières semaines ayant découragé nombre d’automobilistes et de conducteurs de deux
roues.
Pourquoi les associations s’inquiètent-elles ?
L’année s’est mal terminée sur le plan politique. Le 21 décembre dernier, l’Assemblée nationale a adopté
en deuxième lecture un assouplissement du permis à points dans le cadre de la loi sur la sécurité intérieure (Loppsi 2). Contre l’avis du gouvernement, les députés de la majorité ont raccourci de
trois à deux ans le délai nécessaire pour pouvoir récupérer, en l’absence de nouvelle infraction, les douze points de son permis.
« C’est un très mauvais signal adressé aux automobilistes », s’inquiète Chantal Perrichon, la présidente de la Ligue contre la violence routière. Le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, l’a
lui même rappelé pendant les débats parlementaires : c’est bien le permis à points, associé à la multiplication des radars, qui a permis de diviser par deux le nombre de tués sur les routes
depuis 2002.
Comment faire mieux ?
Malgré les succès déjà enregistrés, des marges de progression existent. « L’objectif de 3000 morts par
an en 2012 est ambitieux, mais réaliste, estime Bernard Pottier. La France compterait 47 morts par an et par million d’habitants alors que les Anglais, les Néerlandais ou les Suédois sont à 40
morts par an et par million d’habitants. »
Pour cela, Chantal Perrichon invite les pouvoirs publics à ne pas lâcher sur le « cocktail gagnant » de ces dernières années : « L’articulation entre le permis à points, la multiplication des
radars – qui a permis de renforcer considérablement la probabilité d’être contrôlé –, la fin des indulgences et, enfin, l’accent mis sur la lutte contre les petits excès de vitesse. »
« Il est surtout essentiel de marteler qu’il n’y aura pas de tolérance contre les infractions routières », rappelle Chantal Perrichon, qui déplore donc particulièrement le « message » envoyé
dernièrement par les députés.
« Nous allons remonter au créneau en janvier lors de la deuxième lecture du texte au Sénat, avance Chantal Perrichon. Et nous demandons au président de la République de réaffirmer son engagement
en matière de sécurité routière. » La Ligue contre la violence routière a par ailleurs demandé l’interdiction complète du téléphone au volant, y compris avec un kit mains libres. Une expertise a
été commandée et devrait être présentée au gouvernement au tout début de 2011.
Que fait l’Europe ?
Des progrès sont attendus du côté de Bruxelles. La Commission européenne a en effet adopté début
décembre un projet de directive qui permettra, grâce à un réseau électronique d’échanges de données, de poursuivre dans leur pays les conducteurs en infraction à l’étranger.
En moyenne, 25% des infractions constatées sur les routes de France – voire 50% l’été dans certains départements frontaliers – sont le fait d’automobilistes européens qui échappent pour le moment
aux poursuites. « C’est une très bonne nouvelle, même s’il faudra attendre deux ans pour que le système soit opérationnel », affirme Bernard Pottier.
Emmanuelle RÉJU
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