PV annulés: le maire de Biarritz encourt jusqu'à 10 ans de prison (plainte du SDPM)
Publié le 11 Décembre 2013
Mis en examen pour des PV annulés
Le maire centriste de Biarritz a passé neuf heures en garde à vue dans une affaire de suppression de contredanses dont auraient bénéficié des personnalités.
Adrien Cadorel | Publié le 11 déc. 2013, 07h00
Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), hier. Didier Borotra a annoncé lui-même sa mise en examen. (AFP/Gaizka Iroz.)
Didier Borotra s’est-il mis lui-même à l’amende? Agé
de 76 ans, le maire (MoDem) de la prestigieuse station balnéaire des Pyrénées-Atlantiques,
placé hier matin en garde à vue à Bayonne, a été mis en examen hier soir dans le cadre d’une enquête liée à d’intrigantes suspensions de PV au sein de sa
commune. Dans les faits, l’édile a été
entendu à la suite d’une enquête de la Direction des finances publiques du département qui a découvert l’annulation de 3619 procès-verbaux dressés entre mars 2009 et septembre 2010 par les
policiers municipaux de Biarritz.
En juin dernier, le quotidien « Sud Ouest » avait
dévoilé l’ouverture d’une information judiciaire contre X pour « destruction, soustraction ou détournement de fonds publics ou pièces par personne dépositaire de l’autorité publique ou l’un de
ses subordonnés ». Cette révélation avait provoqué l’embarras ainsi que la mise en examen de Xavier Blaisot, directeur de la police municipale de la ville.
Il rejette la faute sur
la police municipale
« Cela faisait un long moment déjà que mes collègues
entendaient parler d’étranges pratiques concernant les PV », explique Cédric Michel, président du Syndicat de défense des policiers municipaux,
qui a déposé plainte et s’est constitué partie civile dans ce dossier. « Puis les conclusions du rapport ont démontré que près de 10% de l’ensemble des PV délivrés ont été annulés, alors que
seuls 1% le sont sur la même période dans la plupart des villes de France. »
L’été dernier, Didier Borotra — qui a récemment
déclaré qu’il ne se représenterait pas aux prochaines municipales après quatre mandats consécutifs — avait partiellement rejeté les accusations et contesté avec force le montant de 70000 € de
préjudice lié à ces annulations. « Comme seule explication, M. Borotra n’a rien trouvé de mieux que de rejeter la faute sur la police municipale qu’il a qualifiée d’incompétente, car elle
délivrait soi-disant des PV donnant souvent lieu à contestations », poursuit Cédric Michel, qui conclut : « Ce n’est pas au maire de faire annuler ces procédures, mais au ministère public. »
L’immense majorité de ces PV étaient délivrés à la suite de stationnements irréguliers ou abusifs. Selon nos informations, si ces derniers visaient notamment des personnes à mobilité réduite, des
infirmières libérales et des personnes âgées, une part non négligeable concernaient des personnalités politiques de la région, quelques célébrités propriétaires de résidences secondaires dans la
ville et ses alentours, ainsi que plusieurs rugbymen du Top14. « Il est clair qu’il y a des dysfonctionnements à Biarritz », avoue un haut gradé policier de la région, qui évoque « un système
clientéliste dénoncé par certains depuis le début des années 2000 ».
A sa sortie du palais de justice en fin de soirée,
Didier Borotra a annoncé lui-même sa mise en examen.
Le maire centriste de Biarritz, Didier Borotra, 76 ans, mis en examen pour avoir abusivement annulé des milliers de contraventions, encourt jusqu'à dix ans de prison, a indiqué mercredi le Parquet de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) lors d'une conférence de presse.
Les chefs de mise en examen retenus à l'encontre de l'ex-sénateur MoDem, selon Anne Kayanakis, Procureur de la République, sont soustraction, détournement ou destruction de fonds ou d'effets publics par personne dépositaire de l'autorité publique ou l'un de ses subordonnés, ainsi qu' immixtion dans une fonction publique, mesures destinées à faire échec à la loi.
Revenant sur la genèse de l'affaire, Anne Kayanakis a expliqué que "le Parquet a été destinataire de réclamations, de signalements venant de sources multiples qui démontraient que des procès-verbaux, de manière récurrente, étaient interrompus au niveau de la police municipale de Biarritz". "Parallèlement, des personnes qui pensaient avoir bénéficié +d'indulgences+ se sont retrouvées avec des amendes forfaitaires majorées. Ce qui a permis d'établir que certains dossiers étaient +mal gérés+ et que malgré +l'indulgence accordée+ la procédure suivait son cours pour certains PV", a-t-elle ajouté.
En 2010, à la suite d'un signalement à
l?autorité préfectorale, celle-ci a ordonné une
vérification financière de la régie de la police municipale de décembre 2010 à mars 2011.
En février 2012, un rapport des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques a établi de manière formelle cette pratique qui a conduit à l'ouverture d'une information judiciaire: "Les mesures destinées à ne pas appliquer la loi étaient liées à des instructions données à la police municipale de ne pas donner de contraventions sur certaines infractions (...) comme ne pas relever les usages de téléphone portable au volant, défaut d'assurance, excès de vitesse", a-t-elle indiqué.
Mardi soir, à l'issue de sa mise
examen, Didier Borotra, lors d'une conférence de presse improvisée devant le Palais de justice de Bayonne, a contesté les
chiffres sur lesquels portaient ces "irrégularités". Le chiffre connu par la presse était alors de 3.619 procès-verbaux irrégulièrement annulés de mars 2009 à décembre 2010.
Didier Borotra, maire depuis 1991, sénateur de 1992 à 2011, a décidé, bien avant d'être mis en examen, de ne pas se représenter pour un quatrième mandat à la mairie et s'est gardé de se prononcer publiquement sur sa succession, ce qui augure d'un scrutin incertain entre les trois principales listes - UMP, centriste et gauche -- toutes trois dirigées par des personnalités de la majorité municipale sortante.
AFP