Cazeneuve refuse d'aligner la "légitime défense" des gendarmes aux policiers nationaux et municipaux

Publié le 3 Avril 2015

Cazeneuve refuse d'aligner la "légitime défense" des gendarmes aux policiers nationaux et municipaux

Le sacrifice des policiers lors des événements funestes de janvier a conduit la droite, à l'initiative du député UMP Éric Ciotti, à déposer une proposition de loi visant à permettre plus aisément aux policiers l'usage de leur arme pour se défendre. Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur, a écarté jeudi cette proposition, considérant que les risques juridiques du texte de Ciotti étaient trop grands vis-à-vis de la Convention européenne des droits de l'homme. 

Néanmoins, le locataire de la Place Beauvau propose à l'opposition de réfléchir à la question dans un groupe de travail qui comprendrait des parlementaires de la majorité et de l'opposition, des représentants de l'inspection de la police et de la gendarmerie nationale, le président de la commission des Lois. "Nous n'avons pas besoin de la confrontation sur un sujet comme celui-ci", a lancé Bernard Cazeneuve. La droite, elle, considère qu'on a perdu trop de temps vu l'urgence de protéger les forces de l'ordre contre la menace terroriste et d'une délinquance surarmée.

Cazeneuve défend la spécificité des gendarmes

Bernard Cazeneuve reconnaît le "bon sens apparent" d'aligner le régime de la légitime défense des gendarmes et des policiers. Mais il rappelle que la légitime défense exige, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, un "danger réel et actuel", et que la riposte doit être d'une "absolue nécessité" et de manière "proportionnée à la menace". Or les juges appliquent ces critères aussi bien aux gendarmes et aux policiers qu'aux simples quidams.

Il estime également que le texte de l'UMP, en supprimant ces critères, permettrait aux forces de l'ordre de tirer sur l'agresseur sans limitation de temps après l'agression. Il a également rappelé la spécificité militaire des gendarmes qui, selon le Code de la défense, peuvent après sommation verbale et en cas de voie de fait user de leurs armes "pour défendre leur terrain ou immobiliser le véhicule, ou défendre une zone de défense hautement sensible".

Marion Maréchal-Le Pen pour une présomption de légitime défense

Le ministre préfère s'en remettre au sang-froid des policiers et souligne la fragilité juridique du texte proposé par Éric Ciotti. Qu'en est-il des tireurs d'élite qui auraient dans leur viseur un criminel ? Peut-on considérer alors que, selon le texte de l'UMP, les policiers et les gendarmes pourraient tirer sur un criminel en fuite ? Bref, Cazeneuve a jugé que le texte de Ciotti était imprécis et "juridiquement contestable".

Le groupe des radicaux de gauche (Alain Tourret) et le groupe PS, sans surprise, se sont ralliés au point de vue de Bernard Cazeneuve. L'UDI a montré également des réticences vis-à-vis de son partenaire UMP et a appelé ses membres à s'abstenir sur le texte d'Éric Ciotti. Marion Maréchal-Le Pen, députée FN, est intervenue dans le débat en débordant l'UMP sur sa droite : l'élue du Vaucluse souhaite que le législateur instaure une "présomption réfragable (*) de légitime défense" en faveur des forces de l'ordre, quitte à ce que leur formation à l'usage des armes soit renforcée. Néanmoins, faute de mieux, elle a accepté de voter la proposition d'Éric Ciotti.

D'après www.lepoint.fr

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