Woerth avance à pas prudents sur les retraites des fonctionnaires
Publié le 22 Avril 2010
Les premières discussions lancées jeudi matin n'ont pas donné lieu à affrontement direct entre le gouvernement et les syndicats. "On n'a pas senti une volonté délibérée de tomber sur le dos des fonctionnaires", souligne-t-on à l'Unsa.
La deuxième phase de la concertation sur l'avenir des retraites en France, chantier prioritaire de 2010, s'est ouverte jeudi avec la rencontre entre le ministre du Travail et les syndicats de fonctionnaires. Première à être reçue, Elisabeth David, de l'Unsa, a confirmé la volonté du gouvernement de réduire les déficits des retraites mais a souligné qu'il faisait preuve d'écoute. "On n'a pas senti une volonté délibérée de tomber sur le dos des fonctionnaires", a-t-elle dit à des journalistes après sa rencontre avec Eric Woerth et le secrétaire d'Etat à la Fonction publique, Georges Tron. "Ce qu'ils veulent, c'est (réduire) le déficit, qui est considérable. Le constat, on le partage, mais sur les façons de faire, on aura certainement quelques désaccords". Elle a affirmé l'opposition de l'Unsa à la remise en cause du mode de calcul de la retraite des fonctionnaires, en particulier le calcul des pensions sur les salaires des six derniers mois, contre les 25 meilleures années dans le privé. Comme la quasi totalité des syndicats du privé, l'Unsa s'oppose aussi à la remise en cause de l'âge légal de départ à la retraite, actuellement fixé à 60 ans.
"Nous ressortons avec des propositions de groupes de travail, (mais) nous ne savons pas plus sur quoi nous discuterons spécifiquement sur la Fonction publique", a regretté pour sa part Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, à la sortie de sa propre rencontre avec le ministre. Selon elle, Eric Woerth "n'a pas avancé de propositions, il n'a pas donné de signes". Et la FSU a précisé les points à ne pas remettre en cause : "Nous avons dit qu'en aucun cas nous n'accepterions de régressions pour les fonctionnaires, que nous ne discuterions pas sur les six derniers mois pour le calcul de la retraite". Autre "ligne rouge" pour Bernadette Groison, la remise en cause de l'âge légal de départ à la retraite.
Principal sujet de discorde : le mode de calcul des pensions
Le lancement de la concertation sur les retraites la semaine dernière avec les confédérations syndicales a mis en lumière la vive opposition entre le gouvernement, le patronat et les syndicats sur la nécessité, affirmée par les deux premiers, de travailler plus longtemps pour financer les besoins financiers croissant des régimes de retraite. Dans ce dossier explosif, les retraites de la fonction publique apparaissent comme un sous-dossier brûlant : elles sont souvent présentées comme plus avantageuse que celle du secteur privé, mais les syndicats de fonctionnaires refusent de les voir stigmatisées. Eric Woerth et Georges Tron doivent encore rencontrer ce jeudi des dirigeants de la FSU, de la CGC Fonction publique et de l'Uffa-CFDT Fonction publique. Les représentants des fonctionnaires CGT, FO et CFTC seront reçus lundi, et ceux de Solidaires mardi.
La réforme de 2003 a déjà aligné sur le privé la durée de cotisation des fonctionnaires pour une retraite à taux plein (160 trimestres en 2008), mais les critiques persistent sur le caractère plus favorable du régime des fonctionnaires. Principal sujet de discorde, le mode de calcul des pensions, qui dans le privé tient compte des 25 meilleures années de salaires contre seulement les six derniers mois dans la fonction publique... mais sans intégrer la majorité des primes, qui représentent en moyenne 20% du salaire.
Autre inquiétude, la hausse du taux de cotisation des fonctionnaires (7,85% contre 10,55 pour le privé), évoquée par Georges Tron. "Dans un système où on détruit des emplois, ça n'a pas de sens", répond la CFDT, tandis que FO exige que toute hausse de cotisation soit compensée par une hausse des salaires. Les syndicats craignent enfin la suppression des avantages familiaux (comme la majoration de cotisation accordée aux mères de famille) et des catégories actives, ces métiers dangereux ou pénibles (police, surveillants pénitentiaires) qui permettent de partir à 50 ou 55 ans. "On a été échaudé avec les infirmières", qui ont récemment perdu leur possibilité de partir plus tôt en échange d'une hausse de salaires, indique Brigitte Jumel. Mais les catégories actives "partent de toute façon de plus en plus tard" pour cause de retraites trop faibles, note FO.